Pause

Après plusieurs mois sur la route, qui plus est dans un même pays, aussi immense et varié soit-il, il arrive que la lassitude s’installe.

S’il y a un an dans le Nord, les journées n’étaient souvent qu’une succession d’heures monotones à pédaler à travers des paysages souvent peu variés, avoir un objectif nous faisait tenir. Arriver à la prochaine épicerie (dans plusieurs centaines de kilomètres) pour pouvoir se ravitailler, chez notre prochain hôte pour prendre une douche et parler avec un autre humain, et tout simplement avancer vers le sud avant que l’hiver ne nous rattrape. Pas vraiment le temps de se poser trop de questions. Et même si nous nous sommes souvent demandé ce que nous faisions là, au fur et à mesure que nous avancions tout prenait un sens. Les souvenirs que nous gardons du Nord sont ancrés en nous pour toujours et nous n’avons qu’une envie : y retourner un jour, revoir cette faune incroyable, ces arbres géants, ces immensités sauvages abrutissantes d’inhumanité.

Au Mexique tout est différent : les distances sont beaucoup plus courtes, les paysages et climats incroyablement variés (il suffit de monter ou descendre de quelques centaines de mètres pour changer totalement d’écosystème), la culture est ancienne et très riche : partout il y a quelque chose à voir, à goûter, à toucher, à écouter… Et surtout, partout il y a d’autres humains. Si bien qu’après plusieurs mois d’un rythme très décousu, nous avons saturé. Nous nous sommes tellement gavés de ce pays que l’indigestion est arrivée. Plus envie. Plus envie de Mexique, plus envie de vélo, pus envie de rencontres, plus envie d’explorer.

Alors après avoir mûrement réfléchi, nous avons décidé de rentrer. La décision s’est prise naturellement; j’étais cloué au lit après m’être fait piqué par des moustiques et nous avons soupesé les différentes options que nous envisagions : continuer coûte que coûte au mental sans prendre de plaisir et bâcler la partie qui nous intéressait le plus, s’arrêter pour travailler ou faire du volontariat, rentrer. C’est finalement cette dernière option qui s’est imposée, et à peine les billets d’avions réservés nous nous sommes sentis libérés d’un immense poids.

Ce n’est pas un retour définitif, mais une pause. Une pause nécessaire pour souffler, préparer la suite, revoir nos familles et amis, faire quelques ajustements matériels… Nous pensions sincèrement pouvoir traverser le continent américain en une fois, sans prendre d’avions, sur deux à trois ans. Mais une traversée sur deux ans, c’est à la fois trop court pour avoir vraiment le temps de profiter de chaque région qui nous intéresse et trop long pour vivre en nomades sans pauses sédentaires. Alors nous avons préféré décider le faire en étapes pour garder la flamme intacte. Voyager c’est avant tout apprendre sur soi, évoluer et s’adapter. Nous ne savions pas vraiment ce que nous cherchions quand nous sommes partis. Tout comme nous, nos projets et nos envies peuvent mûrir et changer au fil du temps et de l’expérience acquise. Savoir s’écouter, mieux connaître nos envies et nos limites (qui elles aussi évoluent), réajuster nos plans plutôt que foncer tête baissée vers un objectif défini avant le départ, c’est aussi une des leçons que nous avons apprise de cette année et demie sur la route.

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